Nos amis les bêtes
Mis à jour 12 septembre 2024
Les ours
La scène se passe en avril 2003 à bord de l’ USS Connecticut. Le sous-marin fait surface au travers de la glace arctique à proximité de la station-laboratoire de physique appliquée de l’université de Washington. Il subit une attaque d’ours polaires, qui mordent son gouvernail. Le Connecticut n’a pas subi de dégâts importants et a pu mener à bien sa mission.
Une scène semblable s’était déroulée la même année, en octobre 2003 avec USS Honolulu à 280 miles du pôle Nord.
Mais tous les ours n’ont pas eu cette chance. En novembre 2020, une femelle et son ourson sont abattu par des soldats russes alors qu’ils vaquaient autour près du village de Rybachiy dans la péninsule extrême-orientale du Kamtchatka, qui sert de base de construction de sous-marins depuis les années 1960. Un porte-parole de la flotte du Pacifique de la marine russe a déclaré à l’agence de presse russe Interfax que les ours avaient été vus à plusieurs reprises ces derniers jours et constituaient une menace pour les villageois.
Un autre ours polaire avait été pris en photo en 2019 alors qu’il sautait sur un sous-marin russe de classe Delta IV près de l’archipel norvégien du Svalbard. L’ours aurait été attiré par le submersible après que l’équipage a jeté des déchets par-dessus bord. L’énorme animal a reniflé autour du navire et les marins à bord ont reçu l’ordre de rester à l’abri.
Concours de barbichette sur l’Archerfish
Nous sommes en janvier 1961 sur l’USS Archerfish (SS-311). Le sous-marin est au ravitaillement dans le New London et deux marins passablement ivres reviennent à bord avec une chèvre et un coq (qui eux, sont sobres). La chèvre monte discrètement à bord et est enchaînée dans la salle des machines et les marins défilent pour faire un concours de longueur de barbe. Mais il a fallu se résoudre à la débarquer malgré les protestations de l’équipage et de la chèvre. Cette dernière est restée affectée au COMSUBLANTMEDGRU où elle participa à des exercices scientifiques qui impliquaient de remplir ses poumons avec un liquide spécial qui lui permettait de respirer sous l’eau pendant quelques jours.
Si cette histoire prête à rire, il faut savoir que des chèvres ont été utilisées pour tester la résistance des organismes aux accidents de décompression et autres intoxications gazeuses. Ce n’est qu’en 2008 que la Royal Navy a annoncé renoncer à ses pratiques.
Un renne comme cadeau
Source : War History Online
L‘histoire est un petit peu plus ancienne que la période couverte par le livre, mais elle est trop belle pour ne pas la raconter. En 1941, le HMS Trident s’était arrêté en Union soviétique pour des réparations. Le capitaine, Geoffrey Sladen, a été invité à dîner avec l’amiral russe. Au cours de ce dîner, on pense que Sladen a avancé que sa femme avait du mal à pousser son landau dans la neige hivernale d’Angleterre. Cela a naturellement conduit l’amiral russe à déclarer que ce dont ils avaient besoin était un renne. Une autre version indique que le renne a été donné à l’équipage en reconnaissance de leur combat contre les forces allemandes dans le cercle polaire arctique. Les Russes reconnaissants ont donc donné le renne à l’équipage du sous-marin en cadeau avec une botte de lichen avant de quitter le port.
Le capitaine Sladen, ne voulant pas paraître impoli, chargea le renne dans le sous-marin. Pour ce faire, l’équipage a dû le descendre à travers l’un des tubes lance-torpilles. Le baril de mousse a été placé dans la zone du magasin de nourriture et de torpilles où le renne (surnommé Pollyanna) devait rester. Ce dernier a cependant pris goût à la cabine du capitaine.
Le tonneau de mousse fourni par les Russes pour nourrir Pollyanna n’a pas duré longtemps et Pollyanna à continuer à manger les restes dans le mess de l’officier puis le lait concentré Carnation pour finalement manger certaines cartes de navigation. Prenant ses aises, le renne a semblé s’habituer à la vie quotidienne d’un sous-marinier. Il était généralement le premier à se diriger vers la salle de contrôle chaque fois que l’écoutille principale devait être ouverte pour un peu d’air frais et est devenu familier des bruits et ordres du bord.
Le HMS Trident est rentré au Royaume-Uni après six semaines de patrouilles au large de la Norvège. Arrivé à Blyth, l’équipage a été confronté à un nouveau problème. Tout le lait concentré et les restes que Pollyanna avait mangés lui avaient fait prendre beaucoup de poids. Il était maintenant trop gros pour passer à travers le tube lance-torpilles qui lui avait permis d’entrer dans le sous-marin. L’équipage a treuillé le renne à travers l’écoutille avec l’aide d’un membre d’équipage armé d’un balai.
Pollyanna n’a jamais été en mesure d’aider la femme du capitaine Sladen puisqu’il a été donnée au Regents Park Zoo. Le renne et le sous-marin ont survécu à la guerre. Cinq ans après avoir quitté le HMS Trident, Pollyanna est décédé au zoo de Londres en 1947. Au cours de cette année, le HMS Trident a également été mis hors service par la marine. Pendant les cinq années passées au zoo, on dit que Pollyanna n’a jamais oublié ses manières de sous-marinier. On dit qu’il baissait la tête lorsqu’il entendait des sirènes, des cloches ou tout autre sons semblables à ceux entendu dans le sous-marin.
Le Chameau
Une histoire comparable serait arrivée en 1913 lorsque le U-boot UC20 qui, se rendant coupable d’un trafic d’armes avec le Maghreb pour le compte du Kaiser, reçu en cadeau du Cheikh local un chameau.
Ils fixèrent alors l’animal sur le massif et réussirent à naviguer à une profondeur de 12,5 m, l’animal réussissant à garder la tête hors de l’eau. On ne sait comment s’est terminé l’histoire !
Lors de la première guerre mondiale, on a même transporté des chevaux, mais c’est une autre histoire.
Autres animaux de compagnie
De manière générale, les animaux sont interdits à bord (sauf peut-être quelques poissons exotiques). On trouve des récits d’animaux mascotte, principalement des chiens, souvent pendant la deuxième guerre mondiale. Le chien Garbo à bord de l’USS Gar (SS-206) en est le meilleur exemple. Cette cohabitation était possible car les diesels électriques remontaient tous les jours à la surface. En France, l’interdiction date de 1980 et auparavant, on y a toléré parfois des serpents, tortues, poussins éclos à bord, des grillons, etc. Nathalie Guibert dans son livre « Je n’étais pas la bienvenue » évoque même un Jeannot à grandes oreilles sur « le Redoutable ». Un canular de haute volée !
On note toutefois une exception célèbre, c’est Musya, une chatte qui navigue depuis quatre ans sur le Stary Oskol (B-162), un sous-marin de Classe Kilo. Elle a même donné naissance en février 2019 à sept chatons à 200 mètres de profondeur.
Avant 1945, l’embarquement des chiens à bord des sous-marins, fut dans un premier temps, une nécessité, avant de devenir mascottes à part entière. Les sous-marins de l’époque n’avaient aucun moyen de contrôle de l’atmosphère ambiant, et le chien étant le plus près du plancher était le premier à être incommodé par au moins deux gaz lourds redoutables : le dioxyde de carbone et le monoxyde de carbone s’échappant généreusement lors des ratés de lancement. A la sortie de la guerre, on accueille toujours quelques petits toutous (Popeye, Fifille, Casa, Mickey, Jobic, Arbre à Came, Pic-Pic, Fifi, Phallus, Milord, Prosper, Aristo, etc.) en tant que mascotte, mais cette habitude disparait au début des années 60 (en France). Certains toutous ont fait de la résistance comme Gym à bord du Gymnote en 1973 (il avait la fâcheuse habitude d’uriner au pied des silos missiles). Petit clin d’œil à Fifille qui à bord du Marsouin (Classe Narval), donnera naissance à Scapa et Gardon le 9 octobre 1961 au large de l’Ecosse.
Aujourd’hui, on utilise dans l’US Navy des chiens pour détecter des explosifs potentiels, mais ils ne partent jamais en mission (contrairement à ce que pourrait le faire croire Bear, le Jack Russel du capitaine Ramsey dans le film USS Alabama (Crimson Tide).
On trouve aussi des aquariums dont le niveau d’eau est soigneusement rabaissé pour éviter les débordements (qui doivent tout de même arriver régulièrement en cas de remontée urgente).
Autres passagers clandestins
Il n’y a pas que les ours qui aiment voyager sur des sous-marins. On trouve des morses, des otaries, des lions de mer, des phoques. Des passagers quelque peu encombrants mais qui font le bonheur de l’équipage !
Petit album de famille…