ESPAGNE

Sur le plan historique, Navantia est une entreprise de construction navale appartenant à l’État espagnol qui offre ses services aux secteurs militaire et civil. C’est le 5ème constructeur de navires en Europe et le 9ème dans le monde avec des chantiers navals tout autour de l’Espagne. Astilleros Españoles SA a été créée en 1967 par la fusion des « chantiers navals basques d’Euskalduna » et de « La Naval de Sestao et d’Astilleros de Cádiz ». En juillet 2000, il fusionne avec les chantiers navals publics, « Empresa Nacional Bazán », pour former IZAR. En mars 2005, la SEPI (Sociedad Estatal de Participaciones Industriales) intègre la division navale d’IZAR à Navantia.

Chantier Naval Navantia

Au début des années 1970, pour sortir de sa dépendance aux Etats-Unis (accord stratégique de 1953), l’Espagne de Franco entame un rapprochement politique avec l’Europe. Elle noue des accords en particulier avec la France dans le domaine militaire via les Accords Debré-López Bravo, qui prévoient l’acquisition de sous-marins S60 dérivés des Daphné de la Marine nationale. C’est ainsi que l’Armada débute la modernisation de sa Force sous-marine avec l’acquisition de quatre unités S60, désarmés entre 2003 et 2006. Ils sont alors suivis par la classe S70 issue des Agosta français avec, là aussi, quatre bâtiments entrés en service entre 1983 et 1985. A la fin des années 1990, il apparaît nécessaire de penser à l’avenir.

À cette époque, la France a abandonné la propulsion diesel-électrique pour ses sous-marins, et DCNS (Naval Group) développe avec son partenaire espagnol de l’époque, l’Empresa Nacional Bazan, le projet Scorpène, alliant les performances développées pour nos sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) à un design conventionnel répondant aux besoins de l’exportation. La conception du Scorpène est essentiellement française mais elle permet une participation non négligeable des entreprises espagnoles. Le Scorpène franco-espagnol connaît ainsi un vrai succès à l’export avec les commandes chiliennes et malaisiennes (deux bâtiments chacun).

La collaboration entre les deux constructeurs aurait pu se prolonger s’il n’y avait eu une brouille sévère au sujet du Programme Scorpène au début de sa conception. Les ambitions industrielles espagnoles sont plus importantes que prévues et ont pour objectif de maîtriser la totalité de la conception et de la construction. L’alliance est rompue et l’Espagne se décide à construire seul son sous-marin (mais avec l’aide des Etats-Unis). Le programme de sous-marin d’attaque conventionnel AIP S-80, officialisé en 2005, est censé permettre à l’Espagne d’intégrer le cercle des Etats producteurs-exportateurs. Il est commandé à quatre exemplaires en 2004.

En 2013, la catastrophe industrielle se précise avec un surpoids de l’ordre de 75 à 100 tonnes pour le S-81 Isaac Peral (le sous-marin aurait été incapable de remonter à la surface !) Il faut dès lors revoir tout le programme et faire appel aux ingénieurs de l’Américain General Dynamics pour résoudre le problème. D’autant plus que Navantia compte bien exporter son S-80 et est très présent sur les grands salons internationaux pour le promouvoir. La solution préconisée est un allongement de la coque permettant dès lors d’accroître la flottabilité et le sur­poids constaté. Le projet est ainsi rebaptisé S-80 Plus. Le coût du programme risque d’atteindre 3,9 milliards d’euros (soit près d’un milliard par unité). On allonge donc le sous-marin et on en profite pour allonger le quai (devenu trop court).

Très dépendant d’un client domestique (l’Espagne) fragilisé par une situation budgétaire difficile (budget défense en recul de –21 % depuis 2009), Navantia accélère le déploiement de son offre à l’export afin de maintenir le plan de charge de ses chantiers. Positionnée sur le haut du segment, l’offre de Navantia cible notamment les marchés polonais, norvégien, indien (perdu) et australien (perdu). Très proactif, Navantia a également proposé son sous-marin à des Etats n’ayant pas affiché officiellement une ambition de se doter d’une flotte sous-marine (comme le Maroc).

En outre, faute de pouvoir s’appuyer sur des capacités industrielles nationales sur l’ensemble de la chaîne de valeur, le S-80 Plus intègre de nombreux équipements américains, ou co-développés avec des industriels américains (AIP, CMS, sonars, mâts optroniques). Dès lors, et en l’absence d’une offre américaine sur le segment des sous-marins d’attaque conventionnels, on est en droit de se demander si les Américains ne seraient pas tentés de pousser cette offre à l’international pour se positionner sur ce secteur.

Isaac Péral (Type S-80) et Tramontana (Classe Galerna) - La relève est en marche !

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