Classe Oscar - Projet 949 Granit (Oscar I) et Projet 949A Anteï (Oscar II)

(1981 - )

Mise à jour 2 octobre 2024

  • Période service : 1981 –
  • Bureau d’études : Rubin
  • Prévu : 20
  • Réalisés : 13
  • En service : 8
  • Perdu : 1
  • Propulsion : Nucléaire
  • Hélice : 2 x 4 puis 7 pales
  • Longueur : 
    Projet 949 : 143 m
    Projet 949A : 154,8 m
  • Maître-bau : 18,2 m
  • Déplacement S/P : 
    Projet 949 : 12.500 – 13.400 / 22.500 t
    Projet 949A : 14.820 – 15.100 / 23.860 – 25.650 t
  • Profondeur : 400 m
  • Vitesse surface :
  • Projet 949 : 16 nds
    Projet 949A : 14,6 nds
  • Vitesse plongée :
  • Projet 949 : 32 nds
    Projet 949A : 33,4 nds
  • Equipage : 120 – 130
  • Armement : Torpilles, missiles (AN, C)
Oscar II (Projet 949A)

Le Projet 949 Granit et le Projet 949A Anteï (version améliorée) sont des sous-marins nucléaires lanceurs de missiles de croisière, plus connu par leurs désignations données par l’OTAN, respectivement Oscar-I et Oscar-II. L’Oscar-I a été construit à uniquement deux exemplaires (K-525 “Arkhangelsk” et K-206 “Murmansk”). L’Oscar-II dispose d’une tranche supplémentaire l’augmentant de 20 mètres et d’une hélice à sept pales (contre quatre pour la version I). Ils sont considérés comme étant des « croiseurs », plus spécifiquement des « croiseurs sous-marins nucléaires de premier rang », construits par l’URSS à la fin des années 1970. Ils font partie des sous-marins de la 3ème génération.

Les Projets 949 et 949A ont été conçus dans les années 1970 par le bureau d’étude Rubin et furent parmi les Projets les plus secrets de l’ex-URSS. Le cahier des charges exigeait un sous-marin d’attaque lance-missile ultra-moderne capable de transporter 24 missiles P-700 Granit (SS-N-19) anti-navires d’une portée de 550 km. Ils étaient capables de lancer des charges nucléaires, mais depuis les accords START I et II sur la non-prolifération et la réduction des armes nucléaires, l’armement nucléaire des sous-marins de la Classe Oscar a été officiellement remplacé par des missiles à charge conventionnelle. Les sous-marins nucléaires Anteï (Oscar-II) seront dotés de missiles Kalibr. En 1976, le projet d’y intégrer douze missiles Meteorit M d’une portée de 5.000 km fut abandonné (problème de taille) et finalement dévolu au Projet 667M Andromeda.

Un espace de 3,5 mètres sépare les coques intérieure et extérieure de l’Anteï, ce qui augmente sa flottabilité. Les marins russes ont surnommé ce sous-marin « michette » pour sa forme spécifique. Sa coque intérieure est divisée en dix compartiments.

Au total, l’URSS et la Russie ont mis en service onze sous-marins du Projet Anteï dont le sous-marin K-141 Kursk, qui a coulé en mer de Barents le 12 août 2000.

Le Projet 949AM consistait à moderniser les 949A avec le remplacement des 24 missiles P-700 Granit par des P-800 Oniks et l’installation de 48 missiles Kalibr, Onyx et Zircon pour frapper des cibles côtières. Il n’est pas certain en 2020 que le résultat de cette modernisation soit un succès car les derniers tirs observés étaient toujours des P-700. Une autre version (Projet 949M) armée de missiles P-750 Grom Méteorit-M n’a jamais été mise en service.

Il en sera de même pour le Projet 949Bolid (ou Projet 949I) équipé de missiles anti-navires 3M15 Bolid. Cela devait concerner six unités, à commencer par le sous-marin « Belgorod » (qui sera finalement transformé en SSAN). Dans le cadre de ce programme, le 9 juillet 1990, il a été décidé de procéder à des essais en vol de ces missiles et à leur adaptation aux unités sélectionnées en 1993. Mais en raison de l’effondrement de l’Union soviétique et de la cessation correspondante du financement du complexe militaro-industriel, ces plans n’ont pas été mis en œuvre.

Une dernière version, le Projet 949U, consistant à moderniser le Projet 949A (ou dans le cadre d’une nouvelle série de trois unités), a été abandonnée.

Le K-139 Belgorod, a été reconverti sous le nom de Projet 09852 Belgorod pour des missions spéciales. Il a été lancé en avril 2019. On y reviendra dans la section des SSAN.

La tendance actuelle serait de prolonger la vie de cette Classe de sous-marin et de lui adjoindre des missiles Oniks en plus des Kalibr. En janvier 2024, on annonce qu’ils seront modernisés pour porter les missiles Zircon en commençant par le sous-marin nucléaire Irkoutsk (K-132) puis par le Chelyabinsk (K-442)afin de correspondre au standard 949AM.

Projets 949 & 949A
Projets 949 & 949A (Source Saturnax)
Rare photo du premier Projet 949 Granit (Oscar I)
Rare photo du premier Projet 949 Granit (Oscar I)
Maquette du Projet 949 Granit (Oscar I) - Musée du Club de la Marine de Sébastopol
Projet 949 Granit (Oscar I) et Victor III en mars 1986
Projets 949 & 949A
Projet 949A
Maquette du Projet 949A au Musée Naval Central
K-560
K-266 "Orel"
Illustration David Morel (800tonnes.com)
Projet 949A (Illustration Richard W. Stirn)
K-119 Voronezh avec sa protection anti-drones (Illustration Richard W. Stirn)
Projet de transformation en porteur de cables (abandonné)
Projet 949A "Orel"
Projet 949A tubes ouverts

Le naufrage du Kursk (12 août 2000)

Source : Wikipedia

Le samedi 12 août 2000, le Kursk (Oscar II) est en exercice en mer de Barents, dans le cadre de grandes manœuvres visant à montrer au peuple russe que la flotte est de nouveau opérationnelle comme l’avait promis Vladimir Poutine lors de son élection. Selon la thèse officielle, il devait lancer deux torpilles d’exercice, de Type 65-76 (plus familièrement Tolstouchka, « grosse fille ») d’une longueur de neuf mètres sur le navire Amiral de la flotte du Nord, le Pierre le Grand, un croiseur à propulsion nucléaire de Classe Kirov.

Le système de propulsion des torpilles 65-76 est basé sur une réaction chimique entre le peroxyde d’hydrogène concentré et l’eau. La réaction chimique pousse les gaz résultants vers la turbine. Le peroxyde d’hydrogène est contenu dans un réservoir en métal à l’intérieur de la torpille. Très corrosif, il impose un entretien très régulier des torpilles, avec le changement du réservoir de peroxyde si nécessaire. Si un feu lèche l’enveloppe de la torpille, le peroxyde d’hydrogène se met à bouillir puis explose. Les mémos de sécurité des arsenaux de la marine donnent un délai maximum de deux minutes d’exposition au feu avant explosion de la torpille.

Selon une autre thèse, le peroxyde d’hydrogène ne serait plus utilisé depuis des années en raison des risques qu’il présente ; en revanche, le Kursk devait lancer la dernière version d’un autre type de torpille, une Chkval, qui se caractérise par une propulsion à la vitesse exceptionnelle de 500 km/h (au lieu de 70 km/h pour les torpilles classiques). La Chine en ayant déjà acheté, la présence de deux officiels chinois accrédite l’hypothèse que ces manœuvres étaient l’occasion de faire une démonstration de la nouvelle version. Cette version est aujourd’hui abandonnée.

Deux explosions font sombrer le Kursk à approximativement 135 km de la ville de Severomorsk. Il s’immobilise sur une zone peu profonde de la mer de Barents, à 108 m de fond ; une profondeur si faible que si l’on avait fait basculer le Kursk verticalement, les 50 m de l’arrière (il mesure 154 m de long) auraient été hors de l’eau et les marins qui s’y étaient réfugiés auraient pu en sortir.

À 11 h 28 heure locale, peu avant le lancement des torpilles, une première explosion d’une puissance équivalente à 100 kg de TNT et d’une magnitude sismique de 1,5 se produit dans le compartiment avant du sous-marin. Selon la version officielle, ce serait une fuite de peroxyde d’hydrogène qui aurait réagi avec le cuivre et le laiton des compartiments torpille, conduisant à une réaction en chaîne.

La cloison étanche qui sépare la salle des torpilles du reste du bâtiment étant ouverte, peut-être pour éviter une surcompression d’air lors du lancement des torpilles, mais selon toute vraisemblance plutôt à cause d’une erreur humaine, l’onde de choc se propage aux deux premiers compartiments, tuant probablement sur le coup les sept marins du premier et blessant grièvement les trente-six présents dans le second, où se trouve le poste de commandement.

Au cours des deux minutes qui suivent, le Commandant du navire, qui officie dans le troisième compartiment, ne lance pas de signal de détresse. Aucune balise de détresse n’est larguée, alors qu’un dispositif automatique réagit normalement à tout feu ou explosion dans le sous-marin. Mais un incident survenu l’été précédent dans la Méditerranée, lors duquel un lancement de balise mal évalué avait risqué de dévoiler la position du sous-marin à la flotte américaine, avait amené l’équipage à désarmer ce dispositif. Le moteur du Kursk est mis à pleine puissance, procédure normale pour faire surface d’urgence, en cas de problème.

Deux minutes et quinze secondes après le premier choc, une explosion bien plus importante ébranle le Kursk. Les stations de mesure sismique d’Europe du Nord montrent que cette explosion intervient au niveau du fond marin, ce qui tendrait à prouver que le sous-marin a alors heurté le fond. Ce choc, additionné à la hausse de température engendrée par la première explosion, a déclenché l’explosion d’autres torpilles. Cette seconde explosion développe une puissance équivalente à 3/7 tonnes de TNT, ou une demi-douzaine de têtes de torpilles (les mesures montrent une magnitude sismique de 3,5).

La coque, prévue pour résister à des pressions de 1.000 m de profondeur, est éventrée sur une surface de 2 m2. L’explosion ouvre également des voies d’eau vers les 3èmes et 4èmes compartiments. L’eau s’y engouffre à un débit de 90.000 litres par seconde, tuant tous les occupants de ces compartiments, dont cinq officiers. Le cinquième compartiment contient les deux réacteurs nucléaires du sous-marin, protégé par une paroi de treize cm d’alliage de titane. Heureusement, les cloisons résistent et les barres commandant les réacteurs restent en place.

Dans les compartiments 6 à 9, 23 hommes survivent aux deux explosions. Ils se rassemblent dans le 9ème compartiment tout à l’arrière qui contient le second sas de secours (le premier sas, situé dans le 2ème compartiment, est détruit et hors d’atteinte). Le Capitaine-Lieutenant Dmitri Kolesnikov (un des trois officiers de ce grade ayant survécu) prend le commandement. Après le renflouage du Kursk, on retrouvera sur lui un dernier écrit où il avait dressé une liste des survivants. Dans la partie rendue publique, il relate ainsi les dernières heures de l’équipage :

« Il fait trop sombre ici pour écrire, mais je vais essayer au toucher. Il semble qu’il n’y ait pratiquement aucune chance, 10-20 %. J’espère qu’au moins quelqu’un lira ceci. Voici la liste de membres d’équipage des autres sections qui sont maintenant dans la neuvième et qui vont essayer de sortir. Salut à tous, pas besoin d’être désespéré. Kolesnikov. »

La pression dans la coque est la même qu’en surface. Il est donc théoriquement possible pour les rescapés d’utiliser un sas de secours pour sortir dans la mer Arctique et remonter en surface dans une combinaison de sauvetage spéciale, à condition que des secours attendent au-dessus. On ne sait pas pourquoi cette possibilité de s’extraire du sous-marin n’est pas exploitée. On présume que les survivants ont préféré attendre qu’un submersible vienne s’y arrimer (à moins que l’écoutille externe du sas ait été hors d’usage. L’équipe de renflouement ne mettra que quelques minutes pour ouvrir l’écoutille, ce qui invalide cette dernière hypothèse.

On ne sait pas avec exactitude combien de temps les rescapés ont survécu. Les réacteurs à eau pressurisée s’étant automatiquement éteints, l’alimentation électrique de secours déclina rapidement en puissance et l’équipage fut plongé dans une obscurité totale et une température proche de 0°C.

Les opinions divergent sur la durée de l’agonie des rescapés. Certains commentateurs, notamment du côté russe, se prononcent pour une mort rapide (ce qui les arrangerait bien). On a constaté par la suite des fuites sur l’arbre porte-hélice. A une profondeur de plus de 100 mètres, il aurait été impossible de les reboucher (il est cependant douteux que les presse-étoupes fuient autant sur un sous-marin capable de plonger à plus de 300 m. Ses fuites ont été très certainement une conséquence des explosions et des chocs subits). D’autres pointent que de nombreuses cartouches d’absorbeur de dioxyde de carbone, qui servent à maintenir une composition chimique viable dans l’air du caisson de sauvegarde, ont été retrouvées utilisées. Ceci tendrait à prouver que les rescapés aient survécu pendant plusieurs jours. Ces cartouches semblent d’ailleurs avoir été la cause de la mort des derniers survivants. En effet, au contact de l’eau de mer, elles prennent feu. L’enquête officielle démontre qu’un tel incendie a probablement eu lieu, et que quelques membres d’équipage y auraient survécu en plongeant sous l’eau (les marques de carbonisation sur les murs indiquent qu’à ce moment, l’eau devait arriver au niveau du buste de ceux qui étaient dans le compartiment inférieur). Mais l’incendie a du rapidement consommer l’oxygène résiduel, tuant les derniers survivants par asphyxie. C’est la théorie présentée dans le film « Kursk » en 2018.

Ce n’est qu’en fin de soirée que la marine russe s’inquiète de ne plus recevoir de nouvelles du Kursk. Elle minimise l’incident et les premiers communiqués de presse mentionnent seulement des « difficultés techniques mineures » du Kursk. Vladimir Poutine, élu président de la Fédération de Russie trois mois auparavant, n’interrompt pas ses vacances pour si peu. Les médias le montrent 24 h après l’accident en bras de chemise à l’occasion d’un barbecue avec des amis dans sa villa de la mer Noire.

Le navire de sauvetage Roudnitsky, arrivé sur les lieux du drame le lendemain, vers 8h40, contient deux petits submersibles d’assistance en grande profondeur l’AS-32 (Projet 18392) et le Priz (Projet 1855). Cependant, les batteries du premier ont une capacité insuffisante (il est plus probable que ces batteries n’aient pas été suffisamment chargées, le délai de rechargement étant de 14 à 16 h) et le mauvais temps va empêcher le second d’atteindre l’épave. Lorsqu’il y arrive, quatre jours plus tard, il ne parvient pas à s’y arrimer.

D’après Jean-Michel Carré, quelques heures à peine après le naufrage, un petit submersible de Type AS-15 (Projet 1910) et des nageurs d’élite de la marine russe ont plongé pour examiner en secret le Kursk.

La Russie accepte les aides britannique et norvégienne, mais seulement le 16 août. Accepter est un bien grand mot, car les Russes feront tout pour retarder l’intervention étrangère. On prétexta que les Russes maîtrisaient parfaitement la situation, qu’il y avait un risque de fuite, que les intentions étaient malhonnêtes, etc. Pendant ce temps, à terre et dans les médias, la propagande Russe atteint son paroxysme et les familles sont laissées dans le doute le plus absolu. Les navires de sauvetage partis de Norvège arrivent sur le lieu du sinistre le 19 août. Plusieurs tentatives de sauvetage sont lancées, à l’aide d’un mini-submersible britannique (ROV), le 20 août.

A 4h26, le ROV a été largué du navire de soutien Seaway Eagle à 100 mètres de profondeur, à seulement 25 mètres du fond et son sonar actif a été mis en marche. Alors que le sonar du ROV commençait à balayer le terrain, les opérateurs britanniques n’ont pas pu trouver le Koursk. Il n’était pas là. Selon l’opérateur du ROV, « le sonar ne recevait aucun signal ». Le Koursk avait apparemment disparu. La confusion régnait à bord du navire de recherche. De nombreuses passes de recherche ont été effectuées sur l’emplacement du Koursk jusqu’à ce qu’un faible « ping » soit finalement renvoyé. Les hélices jumelles en bronze massives à sept pales, debout au-dessus du fond marin, étaient le seul composant physique du sous-marin qui a révélé l’emplacement du Koursk. Selon l’opérateur du ROV, « la confusion s’est transformée en étonnement lorsque qu’ils ont réalisé que les tuiles acoustiques sur la coque extérieure du Koursk étaient si efficaces qu’elles absorbaient les signaux sonar actifs du ROV ».

Avant de faire intervenir un submersible, une cloche à plongeur est envoyée sur zone. Les scaphandriers constateront rapidement que la trappe du sas n’est pas coincée, mais que le bâtiment est rempli d’eau. Une caméra sera envoyée à l’intérieur du compartiment 9 et ne fera que constater le drame. Les chances de trouver des survivants sont donc nulles, et la mission de sauvetage est interrompue.

À l’époque de l’accident, les causes sont encore inconnues et trois hypothèses sont évoquées : une explosion de torpille, une collision avec un sous-marin étranger ou l’explosion d’une mine marine de la Seconde Guerre mondiale.

Le renflouage du Kursk est un véritable exploit, puisqu’il s’agit de remonter un sous-marin de 13.500 tonnes du fond marin. Vladimir Poutine prend enfin l’initiative de l’opération afin de récupérer les corps des victimes et de déterminer les causes du naufrage. C’est la société néerlandaise Mammoet (la seule à avoir accepté l’exigence des Russes de découper l’avant et de ne remonter que l’arrière) qui décroche le contrat de 65 millions de dollars. Elle envoie sur place un bateau spécialisé dans ce genre d’opérations, le Giant IV. Le compartiment avant du sous-marin est d’abord découpé par un filin-scie géant actionné par des robots disposés sur le fond marin de part et d’autre du bâtiment. Ce compartiment (dont l’examen aurait permis de révéler les causes des explosions) est laissé au fond, sous prétexte qu’il contiendrait probablement des torpilles non explosées. Sans avoir besoin de trop réfléchir, on peut supposer que rien n’a été laissé au fond de la mer (trop facile d’accès à cette profondeur…). Les périscopes et les mâts télescopiques sont sciés et retirés du kiosque pour ne pas gêner le remorquage.

26 câbles sont ensuite fixés sur la partie principale du sous-marin par un système analogue à celui des chevilles expansives (type « Molly »). Chaque câble est constitué de 54 filins de près de 2 cm de diamètre, eux-mêmes tressés à partir de sept fils d’acier. La remontée est effectuée depuis le navire Giant IV par 26 vérins de levage géants. Cela dure onze heures.

Le sous-marin amputé, qui contient encore 115 corps, deux réacteurs nucléaires et un nombre indéterminé de torpilles, est ensuite remorqué au port de Rosliakovo dans le golfe de Mourmansk pour être mis en cale sèche. L’opération se termine le 8 octobre 2001, soit plus d’un an après le naufrage.

Le renflouage du Kursk permet d’identifier les corps (sauf trois) et de procéder aux obsèques, attendues par les familles. L’équipage est décoré par le gouvernement russe de l’ordre du Courage, et son Commandant, Guennadi Liachine, est nommé héros de la Fédération de Russie. Le témoignage manuscrit retrouvé sur le corps de Kolesnikov aide les enquêteurs à déterminer les circonstances de l’accident, mais une partie de ce document est gardée secrète. La partie avant sera détruite au fond de l’eau avec des explosifs.

Vladimir Poutine confie l’enquête au procureur Vladimir Oustinov. Ses conclusions, rendues en 2002 et basées notamment sur une inspection de quatre mois de l’épave renflouée, avalisent l’hypothèse de l’explosion accidentelle d’une torpille due à une fuite de liquide propulseur. En effet, la torpille mise en cause (65-76) utilise un comburant liquide (Propergol) qui, mis en contact avec l’eau de mer, va produire une énorme quantité de gaz pour entraîner une turbine et les hélices. De multiples négligences ont conduit à ce désastre et des fuites sur ce type de torpille ont été relevées sur d’autres bateaux. Cette version a de nouveau été affirmée de la bouche même de Vladimir Poutine à la télévision en 2018. Les Américains, les Norvégiens et les Britanniques ont confirmé cette thèse. Mais il ne semble pas impossible que cette conclusion soit l’aboutissement d’âpres négociations diplomatiques entre la Russie et les Etats-Unis (comme l’explique le documentaire diffusé sur Thalassa (Koursk – La vérité). Dix amiraux (dont le Cdt de la Flotte du Nord – Popov) seront remerciés ainsi que les ministres (Intérieur, Défense) ayant sous-entendu que les Américains étaient impliqués.

Quand une telle tragédie arrive, c’est forcément la faute des autres. Parmi les autres pistes (parfois utopistes), citons :

  • Un attentat-suicide d’un islamiste du Daghes­tan embarqué dans le sous-marin.
  • Une collision avec un sous-marin Los Angeles.
  • Une torpille lancée par l’USS Memphis après une brève collision avec l’USS Toledo.
  • L’explosion d’une torpille Shkval (Bourasque).

En regardant la coque côté tribord, on constate un trou parfaitement net. Quelle est sont origine ? Selon certains spécialistes, cela ressemble au diamètre d’une charge creuse envoyée par un sous marin américain par ventouse. Certains experts américains affirment même qu’un tel trou est une sorte de marque de fabrique de la torpille américaine MK-48, qui est capable de traverser la doublure en acier grâce à un mécanisme spécial qui se trouve sur le nez et est capable de faire fondre le cuivre. 

Une autre théorie, plus personnelle consiste à imaginer que les Russes aient eux-même fait ce trou pour y passer le cable de scie à diamant. Mais en regardant bien, la découpe ne passe pas par ce trou.

Quoi qu’il en soit, il est surprenant que les Russes aient laissé trainer des photographies montrant ce trou dans la coque.

Une explication simple et possible des circonstances de l’opération de sauvetage et du manque de réaction des autorités russes réside dans l’état de décrépitude dans lequel se trouvait la marine russe à ce moment. Elle montre aussi le décalage entre une hiérarchie militaire formée à la soviétique et très enclin au secret, et une société russe plus avide d’ouverture.  

Cet accident a tué les cent dix-huit membres de l’équipage.

Les torpilles Tolstouchka Type 65-76, utilisées par la marine russe depuis 1976, ont été stockées à terre après cet accident. L’inflammabilité du liquide propulseur est jugée depuis trop dangereuse. De plus, ce liquide est hautement corrosif. Il convient donc de changer régulièrement tous les réservoirs le contenant, ainsi que tous les circuits par lesquels il peut circuler. C’est ce qui n’avait probablement pas été fait dans les délais normaux dans le cas de la torpille embarquée sur le Kursk.

Maquette du Kursk avec quelques objets ramenés à la sur-face (Musée Central des Forces Armées)
Affiche du film
Lettre écrite par le lieutenant-capitaine Kolesnikov du 9ème compartiment du Koursk. Une 2ème note, écrite par le lieutenant Rashid Aryapov dans le 6ème compartiment, n’a jamais été publiée

Incendie du K-150 Tomsk (Septembre 2013)

Le 6 septembre 2013 à 5h, un incendie se déclare sur le K-150 Tomsk pendant des travaux de soudure sur les ballasts principaux. Le bâtiment était en réparation depuis 2010 en raison d’une panne de la station de refroidissement de l’un des réacteurs. Les revêtements destinés à l’isolation thermique et phonique qui recouvrent la coque sont détériorés par les flammes et le sous-marin est fortement endommagé.

A 9h30, le compartiment concerné est de nouveau accessible. Quinze militaires sont blessés au cours de l’incendie et tous reçoivent un traitement à l’Hôpital de la marine.

Capture video de l'incendie

Sauvetage d’un bateau de pêche (14 septembre 2014)

En croire ces derniers récits, le Projet 949A n’aurait que des problèmes. Détrompez-vous, il aurait été en 2014 le Saint Bernard des mers. Un petit bateau de pêche d’Arkhangelsk était en difficulté – il manquait de carburant dans la zone où une violente tempête se profilait. Le sous-marin nucléaire K-119 Voronezh était le plus proche du bateau et il est venu à son aide, prenant le bateau en remorque et sauvant tous les pêcheurs. L’équipage a ensuite été transféré sur un autre navire et l’embarcation livrée aux éléments.

L’Orel (K-226) ou “La vache rugissante”

Les arbres d’hélice de l’Orel (K-266) étaient initialement constitués d’arbres creux plus courts couplés avec des boulons et des accouplements. L’intérieur était rempli de sable de quartz fin. La raison de cette particularité était simple : L’arbre creux était plus facile à fabriquer, plus léger et moins cher que l’arbre plein.
Les arbres d’hélice creux remplis de sable fin aidaient également à amortir les vibrations et le bruit. Hélas, ce n’était pas le cas pour Orel. L’une des conditions préalables au fonctionnement des arbres creux était l’utilisation d’hélices légères, mais la technologie permettant de fabriquer de telles hélices n’était pas encore disponible à la sortie de l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. Orel a donc été lancé en 1992 avec un nouveau modèle d’arbres creux, mais avec les hélices anciennes et lourdes.
Les premiers tests de bruit et de performances ont confirmé que la propulsion fonctionnait comme prévu, mais les premiers problèmes sont apparus presque immédiatement après la mise en service de l’Orel le 30 décembre 1992 au sein de la flotte du Nord. Les deux puits ont commencé à présenter des déformations anormales et ont inévitablement commencé à frotter contre les tunnels du puits. Avec l’augmentation de la vitesse, le bruit des puits a également augmenté jusqu’au point où il complètement noyé le bruit de l’environnement sous-marin, rendant sa suite de sonar pratiquement inutile.. L’Orel fut bientôt connue des sous-marins occidentaux sous le nom de « la vache rugissante ».
Des puits défectueux ont forcé le commandement de la flotte du Nord à limiter les activités de l’Orel et il n’a effectué que deux patrouilles en 1995 et 1996. En raison du bruit caractéristique, il a été régulièrement suivi par les sous-marins des classes Los Angeles et Trafalgar et d’autres patrouilles ont été annulées. Les ingénieurs navals ont tenté de résoudre le problème, mais les calculs ont montré que la seule solution serait le remplacement des deux arbres défectueux. Le problème était que la production des arbres à l’usine de Barrikady à Volgograd était déjà suspendue et qu’il n’y avait pas de pièces de rechange disponibles.
En 2001, il a été décidé de récupérer les arbres d’hélice solides du malheureux bateau jumeau Koursk (K-141), qui a coulé lors d’un accident le 12 août 2000 dans la mer de Barents. Le remplacement a eu lieu pendant une période de réparation entre 2003 et 2004 au chantier naval SEVMASH. Cependant, cela n’a résolu que partiellement le problème du bruit, car les anciens puits de cliquetis déformaient déjà les tunnels des puits à l’intérieur de la coque à un point tel que le sous-marin continuait à émettre des bruits extrêmes, même avec les « nouveaux » puits de Koursk.
Le problème du bruit s’est encore aggravé en 2004, lorsqu’Orel a subi une explosion du réservoir de compensation arrière alors qu’il était en route, causant des dommages importants au 9e compartiment (sur 10 au total) et aux tunnels de puits déjà endommagés. Le ministère de la Défense russe a finalement décidé de procéder à une modernisation en 2013, qui s’étendra de 2014 à 2016. Elle comprenait le ravitaillement des réacteurs, la mise à niveau de l’électronique et des armes, ainsi que la réparation des tunnels de puits endommagés et le remplacement des puits de Koursk par de nouveaux.
L’Orel est revenu dans la flotte du Nord fin 2016 et reste en service actif basé à la base sous-marine Zapadnaya Litsa, à Mourmansk.

Source José Fiuza

Les arbres creux de l'Orel
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